Ouverture des rideaux, trois personnages en triangle qui regardent chacun une direction : l’un le public, l’autre ses pieds et le dernier le ciel. Chacun parle de ce qu’il voit. Il fait nuit.
PUBLIC : Comment ont-ils bien put arriver là ?
PIEDS: En marchant.
CIEL: De ce que l’on raconte, il y a tout d’abord eu un Big Bang et l’Univers fut créer il y à des milliards d’années.
PUBLIC: Ça n’explique toujours pas pourquoi ils sont tous là à nous observer.
CIEL: C’est pour nous questionner sur nous même, nous forcer à nous assumer en tant qu’humains doués de paroles et d’expressions. Ces astres nous renseignent aussi bien sur nous que tout ce que nous pouvons voir simplement avec nos petits yeux d’adultes.
PIEDS: Des astres ? Désastres oui ! Je dirais plutôt des vieilles loques à peine plus propres qu’un ado en mutation.
PUBLIC: Vraiment ? Moi j’en vois certains mieux gâtés par la vie mais je t’accorde le bénéfice du doute pour les autres.
(Tous trois plissent les yeux)
CIEL(ironique): Vous devez avoir une meilleur vue que la mienne, je les vois presque tous identiques.
PIEDS : Ils sont si différents ?
PUBLIC: Plus encore, ils ont chacun leurs propres manière d’être, d’écouter et de ressentir ce que l’on dit devant eux.
PIEDS: Plutôt au dessus.
CIEL: Non, en dessous.
PUBLIC: Bah partout quoi, il y à en haut, en bas, au milieu, sur les côtés et certains ont même un rire.
CIEL : Un rire ?
PIEDS: Moi j’en vois seulement deux.
CIEL: Moi j’entends rien.
PUBLIC: Approchez vous un peu. (Le second s’accroupit et le dernier saute.)
PIEDS: Ils sont toujours deux.
CIEL(s’énerve): Mais c’est à cause de ces lueurs de la ville au loin aussi, ça empêche de bien les observer ! Toi tu as tes lunettes ?
PIEDS:Non.
PUBLIC: Te plain pas, tu manque rien.
CIEL: Ne lui dis pas ça il est déjà presque aveugle ! Je vais te décrire ce que je vois. Nous nous trouvons face à un spectacle nocturne où des formes bougent comme autant d’idées qui se bousculent dans notre esprit. Chacun à son histoire, son vécu, son âge et sa force. Comme nous quoi !
PIEDS: Je les vois bouger mais là j’ai pas vraiment la force de les aimer, plus de regretter ce que j’ai vécu.
PUBLIC : Ce ne sont que des ombres, des fantômes qui sont bercés dans la nuit pour ne pas se trouver dans la lumière.
PIEDS : C’est pour ça que j’ai peur, j’ai avancé grâce à eux toute la journée mais à un moment j’ai perdu mes chaussures et je ne pouvais plus reculer, j’étais à mi-chemin. Alors j’ai continué avec ces bouts de trucs qui se dégradaient au fur et à mesure. Maintenant ils sont tout fatigués et ils me font peur.
PUBLIC : Mais ils étaient déjà avec toi aujourd’hui ?
PIEDS: Depuis un moment, oui.
CIEL (au premier) : Tu sais bien qu’en plus d’être à moitié aveugle, il est aussi un peut fou. (Le second tend l’oreille)
PUBLIC : C’est bien vrai.
CIEL : En plus je t’ai déjà dis tout à l’heure qu’ils étaient là depuis des milliards d’années.
PUBLIC : Je ne les avait pas remarqués pourtant.
PIEDS : Il faut croire que j’ai une meilleure vue que la tienne tout compte fait !
PUBLIC : Je ne sais pas, mais ils commencent à me faire peur à moi aussi, je ne suis plus très sûr de ce que je vois.
CIEL : Ton cerveau te joue des tours.
PIEDS : C’est juste qu’il est pas antipathétique lui !
CIEL : Antipathique.
PIEDS : C’est pareil !
PUBLIC : Ne commencez à vous disputer en jouant avec les mots ! On nous observe !
CIEL : Ils t’observent depuis que tu est né si tu veux tout savoir !
PIEDS : Oui, c’est vrai, je me rappelle d’eux étant petit. Mais ils ne ressemblaient pas à ça.
CIEL : Tu saurais distinguer les différences qu’il y à entre maintenant et il y à 30 ans ?
PIEDS : Même si ce n’est plus très clair, je crois que oui. Ils étaient plus propres, ils brillaient plus.
CIEL : Je ne m’en souvient pas…
PUBLIC : Mais moi je continue à soutenir que c’est la première fois que je les vois.
CIEL : Et nous on est deux à te soutenir l’inverse !
PUBLIC ( à lui même) : Peut-être que c’est moi qui suis fou…
PIEDS : Non c’est moi !
PUBLIC au CIEL : Tu vois, pas besoin de chuchoter, il le sait.
PIEDS : J’entends tout et je vous connais tellement par cœur que je sais à quoi vous penser sans que vous vous en doutiez ! Vous m’avez déjà dit à maintes reprise que j’avais des problèmes en tête et que cela m’empêchait d’aller de l’avant.
PUBLIC : Des problèmes à la tête oui.
CIEL : Tu est aussi un peu tête en l’air, ne l’oublions pas.
PUBLIC : Au moins lui n’a pas la tête dans la lune, on ne comprend pas toujours tout ce que tu veux dire avec tes airs supérieurs !
PIEDS : Super ! Hier (je viens de m’en rappeler), j’ai pensé à ce qu’était la vie.
CIEL : Et tu n’y avait jamais pensé avant ?
PIEDS : Je la connaissais, au même titre que je connais les maths dans un livre d’anglais mais je n’y avait jamais vraiment songé.
PUBLIC : Et comment est-elle ?
PIEDS : Quoi, la vie ?
CIEL : Non, ta pensée.
PIEDS : Grande.
CIEL : C’est tout ?
PIEDS : Bah je ne la vois pas en entier, elle est trop grande et je suis trop petit.
PUBLIC : Personnellement, je n’essaie pas de l’atteindre, trop de choses se bousculent dans mon esprit quand je réfléchit plus de quelques secondes.
CIEL : Ça ne te ferais pas de mal, tu te morfondrait moins.
PUBLIC : Je peut toujours boire un bon verre de vin pour faire passer mon désarroi.
CIEL : Ne te noie pas hein !
PIEDS : Il doit savoir nager, non ?
Silence.